Par Ansoumane SACKO
Date de publication: 12 mai 2019
Note sur l’Auteur :
M. Ansoumane SACKO est Docteur en Droit Public. Il est Conseiller à la Cour Constitutionnelle de Guinée. Il est aussi Maitre-Assistant à la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l’Université de Sonfonia à Conakry.
Introduction
Le développement d’un Etat dépend de la manière dont le pouvoir politique est organisé[1]. Pour assurer la mission de développement, les autorités politiques sont appelées à associer la population à la prise des décisions pour les affaires qui la concerne directement. La décentralisation est donc un mode de gestion qui permet de matérialiser cette vision. A travers celle-ci, les représentants de la population d’une entité territoriale décentralisée élaborent des politiques publiques nécessaires relatives à son développement.
La question soulevée par cette étude n’est pas abordée pour la première fois. Les aspects y relatifs ont déjà été traités dans plusieurs travaux[2]. Quoique le contenu réel et les objectifs de la décentralisation restent masquer encore, à cause de l’émergence de la mainmise des partis politiques sur la plupart des organisations administratives et politiques, dans les années 1980, 1990, et 2000[3], d’énormes efforts sont entrepris aujourd’hui, en vue d’utiliser la décentralisation comme une importante composante de la réforme de la gouvernance avec la constitutionnalisation d’un Haut Conseil des Collectivités Locales[4], une institution d’inspiration malienne.
La décentralisation administrative et technique comme modalité d’Administration de l’Etat est devenue aujourd’hui, un effet de mode dans les Etats d’Afrique Noire francophones. Le cas guinéen en témoigne éloquemment. La décentralisation, selon le Doyen Maurice HAURIOU consiste en « une manière d’être de l’Etat caractérisée par ce fait que l’Etat se résume en un certain nombre de personnes administratives qui ont la jouissance de droits, c’est-à-dire en faisant des actes d’administration »[5]. Allant dans le même sens, Alain BOCKEL considère que la décentralisation « définit les tâches décentralisées selon un critère géographique : elle consiste, dans son essence à individualiser une collectivité humaine sur une partie du territoire et à la charger de gérer l’ensemble de ses propres affaires communes, elle donne naissance à des collectivités territoriales ou locales ayant compétence pour mener une action administrative générale »[6].
Tout en reconnaissant l’existence de collectivités décentralisées conduites par des assemblées élues, dotées de compétences propres qui s’administrent librement, la Constitution guinéenne du 7 mai 2010 pose le principe d’un contrôle à leur égard. En dépit d’une organisation résolument décentralisée, le caractère unitaire et la prééminence de l’Etat demeurent, précisément parce que ce dernier exerce le contrôle de ses collectivités. Aussi, la notion de contrôle est inhérente au concept de libre administration. Car son absence conduirait en effet à identifier ces collectivités à de véritables entités fédérées.
Dans son rapport public 1993, intitulé “Décentralisation et ordre juridique”, le Conseil d’Etat français donne la définition suivante du principe de libre administration : “… s’administrer librement” c’est conduire sans être soumis à des contraintes excessives, et sans interférer avec les pouvoirs législatif, gouvernemental et judiciaire, diverses catégories d’opérations, et prendre dans les mêmes conditions diverses catégories d’actes qui, eu égard à leur caractère administratif, peuvent faire l’objet d’un encadrement par la loi, et d’un contrôle par le juge administratif[7].”
De même, le rapport Mercier sur le bilan de la décentralisation (2000) souligne-t-il la combinaison de deux notions ayant valeur constitutionnelle, la libre administration des collectivités locales et le contrôle de l’Etat sur les collectivités locales.
Le contrôle administratif mis en relief par l’article 69 du code révisé des collectivités locales en Guinée et dénommé contrôle de l’Etat sur les collectivités locales, constitue l’une des missions constitutionnelles dévolues au représentant de l’Etat conformément à l’article 136 al. 2 de la Constitution. L’obligation du contrôle des collectivités territoriales par l’État a donc valeur constitutionnelle. Les prérogatives de l’État figurent dans cette disposition constitutionnelle selon laquelle, le délégué de l’Etat a la charge des intérêts nationaux et du respect des lois.
Le contrôle exercé par le représentant de l’État, s’il contribue à assurer la prééminence des intérêts nationaux sur les intérêts locaux et de faire prévaloir l’unité de l’ordre juridique guinéen, doit être concilié avec le principe de libre administration des collectivités territoriales, qui a lui aussi une valeur constitutionnelle. Ce contrôle vise à encadrer juridiquement l’action publique locale en veillant à ce que les décisions administratives et budgétaires prises par les collectivités locales soient conformes à la règle de droit et compatibles avec les intérêts généraux de l’Etat.
Le code révisé des collectivités locales n’apporte aucun changement perceptible sur l’organisation des entités décentralisées mais plutôt au niveau des modes de désignations des autorités locales et la prise en compte des nouvelles entités décentralisées qui sont les régions. Après l’année 2006 qui a connu un changement fondamental en matière de décentralisation en Guinée, le tournant décisif fut amorcé par la constitution de 2010 à travers la transformation institutionnelle de certaines entités jusqu’alors déconcentrées et l’institutionnalisation d’un haut conseil des collectivités locales[8].
Le Conseil constitutionnel français a été amené à préciser par sa jurisprudence, les limites à ne pas franchir par le législateur en matière de contrôle des collectivités[9].
La finalité du contrôle est par conséquent d’assurer le respect de la loi par les collectivités locales ; cette soumission à la règle de droit étant, dans un Etat unitaire, la condition de l’Etat de droit au plan local. La compétence des personnes morales de droit public est déterminée par les textes et parfois par la jurisprudence. N’ayant pas la preuve d’éléments jurisprudentiels, nous nous focaliserons en conséquence, en ce qui concerne le cas guinéen, sur l’analyse des textes et de la doctrine. Il s’agira essentiellement de démontrer que l’évolution normative intervenue depuis 2006 a permis d’influencer le système de gouvernance des collectivités locales guinéennes dans leur relation avec l’Etat. A ce titre, on est tenté de poser logiquement la question suivante : quels sont les tournants décisifs de l’évolution du contrôle des collectivités locales en Guinée ? Il faut donc partir de la tutelle sur les collectivités locales (I) à l’avènement du contrôle de légalité (II).
I : De la tutelle sur les collectivités locales
Les expériences de décentralisation qui ont été engagées à partir de 1990 marquaient un tournant dans la vie politique du pays, dans la mesure où, non seulement elles survenaient dans un contexte de pluralisme démocratique, mais surtout au plan du contrôle des collectivités locales. Cette décentralisation ainsi affirmée, reposait sur la reconnaissance d’un pouvoir exécutif local élu, mu dans un système politique multipartite. Ce changement s’inscrivait dans la dynamique de la décentralisation amorcée en Guinée en 1990[10]. Il est lié à une évolution normative progressive et générale depuis 1986 (A), avec une décentralisation qui touche l’essentiel du territoire national (B).
A : Une évolution normative progressive et générale depuis 1986
Depuis 1985, on peut dénombrer en Guinée, plus de 34 lois, 29 décrets et 24 circulaires qui sont tous destinés à accompagner le procédé de la décentralisation[11]. On peut évoquer sommairement ici à titre d’exemples, quelques principales actions entreprises pour décentraliser le pays. Le 25 mars 1986, fut publiée l’ordonnance n° 079/PRG sur la réorganisation de l’Administration du pays et l’installation des collectivités locales décentralisées : les districts ruraux et les quartiers urbains, les communautés rurales de développement et les communes urbaines, les préfectures et la ville-capitale Conakry. Cette ordonnance sera suivie par les ordonnances N°003/PRG/SGG/89 du 5 janvier 1989, portant réorganisation des communes de la ville de Conakry et N°003/PRG/SGG/89 du 5 janvier 1989, portant délimitation de la ville et des Communes de Conakry. L’ordonnance n° 019/PRG du 21 avril 1990 sur l’organisation et le fonctionnement des communes en Guinée, a marqué un tournant décisif. Six mois après, fut élaboré le régime financier desdites collectivités[12]. La Loi Fondamentale du 23 décembre 1990, dans son article 88 a consacré l’existence des collectivités locales qui sont les communes et les CRD, alors que l’article 89 était consacré à la libre administration des collectivités locales dirigées par des conseils élus[13]. Ces derniers étaient sous le contrôle d’un délégué de l’Etat en charge des intérêts nationaux et du respect de la loi. C’est ainsi qu’en janvier 1992, la Guinée fut théoriquement décentralisée de la manière suivante : 303 CRD qui comprennent 2300 districts ruraux, 38 communes urbaines qui intègrent 330 quartiers ou voisinages dans les quartiers généraux des préfectures plus les cinq communes de Conakry[14].
La multiplicité de guides et de textes a conduit à la duplication des politiques de décentralisation, des contradictions et des interférences, qui ont contribué à compliquer non seulement la mise en œuvre de toutes les régulations sur les « gouvernements locaux », mais aussi à la rendre impossible[15]. Pour remédier à cette situation, l’Etat décidait de produire un texte fondamental de politiques de décentralisation. Les conditions suivantes avaient dû servir de guides à la mise en œuvre du programme de décentralisation :
– la détermination d’un territoire de compétences des collectivités locales ;
– un mode autonome de désignation et de révocation des autorités locales qui est indépendant du pouvoir central de l’Etat ;
– une gestion autonome et transparente des affaires locales[16].
Le Gouvernement avait donc entrepris de profondes réformes institutionnelles structurelles et économiques parmi lesquelles figure en bonne place la décentralisation. La décentralisation en Guinée est en fait, un projet de société fondé sur les solidarités naturelles mises au service du développement. Pour réaliser cet ambitieux programme, la Direction Nationale de la Décentralisation, placée sous l’autorité du Ministre de l’intérieur et de la sécurité était chargée de la conception et de la mise en œuvre de la politique de décentralisation[17]. C’est ainsi qu’une réorganisation de l’Administration territoriale a été faite à trois niveaux à savoir :
- Les districts ruraux (regroupements de hameaux) et les quartiers urbains ;
- Les Communautés Rurales de Développement (C.R.D.) et les Communes Urbaines (C.U.)
- Les préfectures et la Ville de Conakry qui a un statut particulier[18].
- Les 4 Régions qui sont des circonscriptions administratives.
Cette décentralisation progressive a concerné tout le territoire national en vue de laisser une plus grande place à la participation des populations à la gestion du développement et à la démocratie participative.
B : Une décentralisation qui touche l’essentiel du territoire national
Toutes les collectivités décentralisées ont été mises en place selon un programme pluriannuel qui a commencé en 1986 et qui s’est achevé en 1992. A cette époque 1700 districts, 270 quartiers urbains et 303 communautés rurales de développement[19].
L’ancienne « Province de Conakry était régie par un Statut Particulier » qui tenait compte de son rang de capitale de la République de Guinée. Cette organisation politique et administrative de Conakry offrait aux citoyens, la possibilité de participer aux affaires de la cité, par l’intermédiaire de leurs représentants élus. Le découpage territorial et administratif était le suivant : cinq collectivités territoriales décentralisées de plein exercice dotées de la personnalité morale de droit public et de l’autonomie financière : les Communes de Conakry. Une Structure intercommunale et supra communale, elle-même collectivité territoriale décentralisée de plein exercice (personnalité morale et autonomie financière) : la Ville de Conakry. Les cinq (5) Communes et la ville de Conakry étaient en même temps des circonscriptions administratives de l’Etat[20]. L’Administration et la gestion de chaque commune furent assurées par un Conseil Communal (Organe délibérant), un Maire (organe exécutif), des Services Communaux.
Conformément à la loi, la dotation en ressources propres était une obligation. En termes de dépense, la commune devrait réaliser chaque année un programme qui était également obligatoire. Les recettes et les dépenses annuelles prévisionnelles étaient présentées chaque année sous forme de budget de l’exercice. Le Maire ordonnateur des recettes et des dépenses tenait une comptabilité administrative et restait soumis au droit guinéen en matière de finances publiques (séparation de l’ordonnateur et du comptable). Le Comptable (ou receveur Communal) était un fonctionnaire du ministère des finances, il est seul habilité à manier les fonds communaux[21].
L’ordonnance n°019/PRG/SGG/90 du 21 avril 1990 portant organisation et fonctionnement des communes en République de Guinée, en son article 16 a placé les communes de Conakry sous la tutelle et la surveillance administrative et financière du Gouverneur de Conakry (tutelle rapprochée). La Ville de Conakry regroupait alors ses cinq communes. Cette situation reste reconduite à l’état actuel de la décentralisation. Elle représente un échelon supra communal d’impulsion, de coordination et de contrôle. La ville exerce des attributions d’intérêt général en tant que circonscription administrative de l’Etat et des attributions d’intérêt local en tant que collectivité décentralisée dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Cette mesure fut étendue sur le reste de l’ensemble des villes de l’intérieur.
Quant aux communes de l’intérieur, elles étaient aussi considérées comme le regroupement des habitants d’une ou de plusieurs localités, unies par une solidarité résultant du voisinage, désireux de traiter de leurs propres intérêts et capables de trouver les ressources nécessaires à une action qui leur est particulière au sein de la communauté nationale et dans le sens des intérêts de la Nation[22].
Sur le plan administratif, elle comprenait deux organes :
– un organe délibérant : le Conseil Communal se composait de conseillers élus au suffrage universel direct et au scrutin proportionnel de liste (représentant la population) et de représentants de groupements à caractère économique et social[23]. Le Conseil Communal était alors élu au suffrage universel indirect contrairement au cas spécifique la ville capitale Conakry[24].
– Un organe exécutif : le maire, était à son tour élu au suffrage universel direct par le Conseil Communal au scrutin secret à la majorité absolue[25]. Le Maire avait des adjoints dont le nombre était fonction de l’importance démographique de la commune[26]. Le Conseil Communal était l’organe de décision alors que le Maire représentait l’organe d’exécution. Les pouvoirs de décision alors transférés par l’Etat au Conseil Communal portaient sur les objets variés[27].
Les préfets assuraient le contrôle de tutelle sur les communes urbaines. Le pouvoir de tutelle sur les communes comportait certaines fonctions notamment, la fonction de contrôle. Ainsi, cette tutelle s’exerçait par voie :
– d’approbation ou d’autorisation préalable ;
– de suspension ou de révocation ;
– de constatation de nullité ou d’annulation ;
– de substitution ;
– d’inspection[28].
Sous réserve des dispositions qui étaient prévues en matière d’exercice de tutelle, les actions des autorités des communes avaient force exécutoire à l’expiration d’un délai de quinze jours après leur réception par l’autorité de tutelle, qui pouvait donc autoriser l’exécution immédiate desdits actes[29]. Les décisions soumises à l’approbation ou l’autorisation préalable, elle pouvait décider de prolonger le délai. Ce délai ne pouvait en aucun cas excéder deux mois. Par ailleurs, l’autorité de tutelle pouvait, par arrêté motivé, suspendre toutes décisions des autorités des communes, lorsque celles-ci étaient contraires à l’intérêt général ou au développement harmonieux des communes. Cette suspension ne pouvait excéder trente jours et l’annulation devrait intervenir dans les quarante jours à compter de la date de réception de la décision par l’autorité de tutelle.
Il faut faire remarquer aussi que toutes les décisions qui sortaient des attributions des autorités de la commune et qui étaient contraires aux lois et règlements, ou qui étaient prises par des conseils illégalement constitués étaient nuls de plein droit[30]. La substitution de l’autorité de tutelle à l’autorité locale était l’un des procédés de tutelle qui s’exerçait en cas de défaillance des autorités des communes après une mise en demeure. En plus, l’autorité de tutelle était dotée d’un pouvoir d’inspection qu’elle exerçait annuellement. Celle-ci faisait l’objet d’un rapport dont copie était adressée aux Ministres résidents, au Gouverneur de la ville de Conakry, aux Préfets et aux Maires[31].
La décentralisation progressive amorcée au début des années 90 a également concerné le milieu rural en tant que collectivité locale à la base. Les Communautés Rurales de Développement (C.R.D.) désormais appelées Commune Rurale (C.R.) étaient au nombre de 303[32]. Les Communautés Rurales de Développement étaient le regroupement d’un ensemble de districts autour d’un district considéré par les populations comme devant être le centre de l’organisation de leurs équipements collectifs[33]. En tant que tel, elles étaient la base en milieu rural dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière. L’organe délibérant de la C.R.D. était le Conseil Communautaire et l’organe exécutif était représenté par le Président du Conseil Communautaire.
Les pouvoirs de tutelle sur la C.R.D. étaient aussi exercés par le Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité. Toutefois, la Tutelle rapprochée était assurée par les Gouverneurs de Régions, les Préfets et les Sous-préfets[34]. Le pouvoir de Tutelle comportait les fonctions et les mêmes modalités que celles qui sont déjà décrites[35].
Partant, de cette évolution progressive que nous venons de décrire, la décentralisation s’inscrivait dans un enjeu dynamique qui a conduit à des réformes actuelles fondamentales. C’est dans ce sens que le nouveau code des collectivités locales a fixé les modalités particulières du contrôle de l’Etat sur les collectivités locales.
II : A l’avènement du controle de la légalité sur les collectivités locales
La fonction de contrôle des collectivités locales se traduit désormais par l’exercice d’un pouvoir que le code des collectivités locales révisé qualifie de « Contrôle de l’Etat sur les collectivités locales »[36]. Ce droit de regard s’exerce sous forme de contrôles administratif, financier et technique. Le contrôle est exercé a posteriori sous réserve des actes soumis à l’approbation préalable du représentant de l’Etat. Le préfet veille dorénavant sur le respect de la règle de droit[37]. Ces avancées bouleversent, au moins en apparence, le droit antérieur en instituant en principe un contrôle a postériori. Le contrôle de l’autorité déconcentrée peut prendre alors plusieurs formes : le contrôle administratif (A), le contrôle financier et technique (B).
A: Le contrôle administratif de la légalité
En vertu de l’article 136 alinéa 2 de la Constitution guinéenne de 2010, « les collectivités locales s’administrent librement par des conseils élus, sous le contrôle d’un délégué de l’Etat qui a la charge des intérêts nationaux et du respect des lois »[38]. C’est pour dire ainsi, que la libre administration dans un Etat unitaire signifie que la décentralisation est une forme d’autonomie et non d’indépendance[39]. Comme le souligne Ch. AUTEXIER « cette ambivalence reflète leur situation à la charnière de l’administratif et du politique »[40]. Ce contrôle, ainsi que le font remarquer F. LUCHAIRE et Y. LUCHAIRE, « doit permettre d’apporter des garanties tant au contribuable qu’à ceux qui contractent avec l’administration locale »[41]. Les traits dominants du nouveau système sont : il s’agit, d’une part, d’un contrôle circonscrit à la légalité et, d’autre part d’un contrôle postérieur à l’entré en vigueur des actes.
En intitulant expressément le chapitre VII du titre 1 des dispositions générales du code des collectivités locales : « Le contrôle de l’Etat sur les collectivités locales », le législateur a voulu marquer le changement par rapport au passé en confiant à l’Etat le rôle de contrôleur à la stricte référence qu’est la légalité par l’interdiction du contrôle d’opportunité[42]. En Guinée, si le législateur a voulu enrayer tout contrôle d’opportunité ; c’est que celui-ci fait partie des modalités les plus énergiques de la tutelle[43]. C’est pourquoi, il a proclamé avec emphase la suppression par l’interdiction de tout contrôle d’opportunité à l’article 69 du code révisé des collectivités locales qui dispose : « Le contrôle s’applique aux organes des collectivités (conseils régionaux ou communaux et leur exécutif), aux décisions et aux actes de ces organes, et aux modalités de leur exécution, il ne porte que sur la légalité et non sur l’opportunité ». Dorénavant, ce contrôle n’implique pas la subordination hiérarchique des organes décentralisés et ne doit pas entraver la libre administration des collectivités locales.
Pour la détermination des actes entrant dans le contrôle de la légalité, la loi de 2017 portant code revisé des collectivités locales met en évidence un critère organique. Le premier alinéa de l’article 71 in limine dudit code se lit : « l’Etat exerce un droit de contrôle sur les actes des collectivités locales ; 1) les délibérations et décisions du conseil ; 2) les décisions prises par délégation du conseil en vertu de l’article 153 du présent Code ; 3) les décisions réglementaires et individuelles prises par l’autorité exécutive locale dans l’exercice de son pouvoir de police ;4) les actes à caractère réglementaire pris par les autorités locales dans tous dans tous les autres domaines qui relèvent de leur compétence en application de la loi. ». En vertu de l’alinéa 2 de la même disposition, la transmission devient la condition ou le fondement du caractère exécutoire des actes des autorités locales et insiste sur le rattachement organique entre les actes concernés par le contrôle et les collectivités locales : « Ces actes sont obligatoirement transmis au représentant de l’Etat dans la préfecture pour le contrôle de légalité(…) ».
Tous les actes des autorités locales ne sont pas soumis à l’obligation de transmission au représentant de l’Etat, mais l’énumération législative des actes concernés par cette obligation permet de les signifier comme les révélateurs de l’exercice d’un pouvoir administratif, de la mise en œuvre de compétence d’intérêt général (local) et par cela même, de la qualité substantielle de « personne publique décentralisée ». Aussi, du fait des dispositions législatives, et par référence aux règles générales de l’action administrative, la qualité d’acte « exécutoire » attribuée aux actes administratifs, notamment unilatéraux, des autorités locales dépend du respect de deux conditions formelles (outre la régularité juridique) ; la publication ou la notification et la transmission[44]. C’est à ce titre que l’article 406 du même code révisé a conféré aux actes pris par les collectivités locales, le caractère exécutoire de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou leur notification aux intéressés, ainsi qu’à leur transmission au représentant de l’Etat ou à son délégué pour les actes visés à l’article 70[45]. Il faut toutefois relever que cette disposition n’intègre pas les actes pour lesquels un agrément ou une approbation sont expressément requis par la loi, qui ne sont exécutoires qu’après obtention de cet agrément ou de cette approbation[46]. Le préfet est tenu d’accuser réception des actes soumis à obligation de transmission dans un délai de quinze jours à compter de la date de réception. Ainsi, nous pouvons affirmer que tout acte soumis à l’obligation de transmission non transmis au préfet est nul. Il en résulte que les actes soumis au contrôle de légalité sont les actes pris par les collectivités locales que ce soit de leur organe délibérant ou de leur organe exécutif. Cette situation correspond au schéma sénégalais en ce qui concerne le contrôle de la légalité des actes[47]. On se rend compte qu’avec cette détermination législative, l’identification des actes concernés par le contrôle demeure facile. Elle devient difficile pour les actes non concernés[48].
Par ailleurs, les actes de gestion des services de l’administration locale ou les actes de gestion courante, les actes d’administration interne et de gestion du personnel ne sont pas soumis à l’obligation de transmission. Ces actes sont exécutoires de plein droit.
Ce champ de contrôle de la légalité réduit par le législateur permet ainsi de dire que le contrôle des actes des collectivités locales en Guinée est partiel ; car les actes contractuels ne sont pas soumis au contrôle du représentant de l’Etat. La règle fixant le contrôle a posteriori est fixée sans ambigüité : « Ces actes sont obligatoirement transmis au représentant de l’Etat dans la préfecture pour le contrôle de légalité »[49]. Désormais, le principe est que les actes des collectivités sont soumis à un contrôle a posteriori[50]. Il s’agit incontestablement comme le dit professeur I.M. FALL d’une innovation importante dont il faut relativiser la portée au regard de la persistance du contrôle a priori sur une catégorie d’actes importants[51]. La même grille de contrôle est applicable aux contrats des collectivités locales.
Le contrôle des actes contractuels est très important lorsque ceux-ci ont la qualité de marchés publics. En l’occurrence, le représentant vérifie le respect par les autorités locales de la législation relative aux marchés publics[52]. Ainsi, les actes énumérés par l’article 71 relèvent d’un régime de contrôle de légalité spécial, celui du déféré préfectoral. Il existe des actes soumis à un contrôle a priori qui ne relèvent pas du déféré préfectoral, mais soumis au contrôle de légalité de droit commun[53]. L’analyse de ces règles, nous permet de distinguer deux régimes d’entrée en vigueur des actes pris par les collectivités locales. Il s’agit d’une part, les actes soumis au principe de la transmission obligatoire au représentant de l’Etat[54] et d’autre part ; les actes qui sont soumis au régime exécutoire de plein droit[55].
Cette dualité du régime de l’exécution des actes des collectivités locales appelle plusieurs remarques : d’abord, l’entrée en vigueur des actes énumérés par l’article 71 considérés comme les plus importants requiert, en principe, un délai de 15 jours tandis que les autres entrent immédiatement en vigueur une fois les formalités prescrites (leur publication ou leur notification aux intéressés) sont remplies. L’aménagement de ce délai témoigne de la volonté du législateur de laisser une marge de manœuvre au représentant de l’Etat et attenue du coup, le caractère immédiatement exécutoire des actes de l’article 71 dont bénéficient, en revanche les autres. C’est pourquoi, il faut justement, noter la persistance du contrôle a priori. Par dérogation au caractère exécutoire des actes prévus à l’article 71 susvisé certains actes restent soumis à l’approbation préalable non pas du représentant de l’Etat mais du ou des ministres compétents en la matière et parfois aussi du Président de la République. Cette situation ne permet pas une meilleure lisibilité de la décentralisation mais plutôt de la centralisation. Il s’agit des marchés publics ainsi que le budget suivant l’article 442 du code révisé des collectivités locales. Ils doivent être approuvés par l’autorité de tutelle. Ensuite, en matière de la coopération décentralisée internationale, les projets de convention de coopération décentralisée internationale sont soumis à l’avis du Ministre chargé des collectivités locales et du Ministre chargé de la coopération internationale. Enfin, en matière d’aménagement du territoire, les projets de schéma de cohérence territoriale sont définitivement approuvés par un décret pris en conseil des ministres. Ils deviennent exécutoires soixante (60) jours après signature du décret d’approbation[56]. C’est seulement dans le cadre des plans d’occupation des sols que l’approbation du représentant de l’Etat est requise[57].
Cette précision des domaines dans lesquels les actes pris doivent faire l’objet d’approbation préalable montre qu’il s’agit des actes les plus importants de la vie de la collectivité locale. En effet du point de vue quantitatif, les actes les plus nombreux sont dispensés de tout contrôle a priori et sont soumis au principe de l’exécution de plein droit. Mais du point de vue qualitatif, des actes déterminants pour la libre administration des collectivités locales (budget, plan, les marchés publics, les engagements financiers de la coopération décentralisée) demeurent encore soumis à l’approbation des autorités de tutelle. Ainsi, comme on le voit, il y a encore dans le droit guinéen de la décentralisation, une coexistence du régime de l’exécution de plein droit des actes locaux et de celui de la tutelle d’approbation des actes les plus importants. On comprend aisément que les rapports Etat-collectivité locale sont ainsi, par excellence, le lieu de véracité de l’adage suivant lequel « la confiance n’exclut pas le contrôle ».
Avec le nouveau régime du contrôle des actes des collectivités locales institué en 2006, puis dans le nouveau code révisé de 2017 on peut dire qu’il y a une certaine uniformisation du contrôle ; car, le représentant de l’Etat examine la légalité des actes quel que soit leur objet administratif ou financier. Lorsque les actes des collectivités ont fait l’objet de transmission, le représentant de l’Etat en apprécie la légalité. Les actes visés par l’article 71 sont principalement les actes unilatéraux[58] et accessoirement les actes contractuels[59]. Il est donc permis d’affirmer que le contrôle de légalité est pour l’essentiel, un contrôle de légalité des actes unilatéraux des collectivités locales, qu’ils émanent des organes délibérants ou des organes exécutifs qu’il s’agisse des actes unilatéraux ou bilatéraux. Le contrôle du représentant de l’Etat reste dans tous les cas un contrôle stricto sensu. Du fait de son rôle de sauvegarde des intérêts nationaux et de gardien de la légalité, après transmission, le représentant de l’Etat exerce de son propre chef le contrôle de légalité ou de faire sur la demande d’une personne lésée. Il examine donc la légalité interne et externe afin de détecter les vices susceptibles d’affecter la légalité des actes administratifs.
Au sujet de la légalité externe, le représentant de l’Etat vérifie la compétence de l’auteur de l’acte, c’est-à-dire son aptitude juridique à prendre l’acte. La violation des règles de compétence par l’auteur de l’acte affecte l’acte du vice d’incompétence, ce qui le rend illégal. Il examine également les aspects liés à la forme et à la procédure d’élaboration de l’acte. La jurisprudence sanctionne surtout le non-respect des formalités substantielles. Outre le contrôle de la légalité externe des actes, le représentant de l’Etat doit également procéder à l’examen de la légalité interne des actes des autorités décentralisées. Il consiste à vérifier si les actes qui lui sont transmis respectent les normes composant le bloc de légalité, d’une part, et ne sont pas pris dans le sens d’un détournement de pouvoir à partir d’un faisceau d’indices, de preuves ou de présomptions. Au demeurant, même conformes à la loi, les actes des autorités décentralisées doivent être motivés par un but d’intérêt général ou local.[60].
La même grille de contrôle est applicable aux contrats des collectivités locales. Le contrôle des actes contractuels revêt une importance particulière lorsque ceux-ci ont la qualité de marchés publics. Le cas échéant, le représentant de l’Etat vérifie le respect par les autorités locales de la législation relative aux marchés publics. Le contrôle de légalité exercé par le représentant de l’Etat sur les actes contractuels entraîne deux remarques. La première est que le contrôle de légalité par voie du déféré qui est un REP spécial contre les contrats paraît assez singulier au regard du droit administratif classique qui se caractérise par le principe d’irrecevabilité du REP contre les contrats administratifs sous réserve de la théorie des actes détachables[61]. Le déféré contractuel que forme le REP contre les contrats des collectivités locales bouleverse ainsi le principe du REP et constitue une nouveauté en droit administratif[62]. Le représentant de l’Etat doit donc porter son manteau de « commissaire du droit »[63], car il est question pour lui d’entreprendre de poursuivre un acte qu’il estime entacher d’illégalité.
En outre, le représentant de l’Etat peut considérer, de bonne foi ou de mauvaise foi, que les actes qui lui sont transmis ne sont pas entachés d’illégalité même lorsque ces actes le seraient effectivement. Toutefois, au-delà de la législation, la jurisprudence guinéenne n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer sur les carences ou d’un mauvais comportement du représentant de l’Etat consistant à un refus de déférer un acte simplement ou manifestement illégal. En France, le CE français à travers l’arrêt Brasserie (CE, 25 janvier 1991, Brasseur) a jugé que le refus du préfet de délibérer un acte, sur la demande d’une personne lésée, au tribunal administratif ne constitue pas une décision susceptible de faire l’objet d’un REP. Cependant, l’existence de cette simple faculté n’exclut pas la responsabilité du représentant de l’Etat en cas de faute lourde, notamment sa négligence prolongée à agir.
Notons aussi qu’en Guinée, le contrôle a posteriori a un caractère général[64]. Le ministre chargé des collectivités locales soumet au Gouvernement, avant le 31 décembre de chaque année, un rapport sur le contrôle a posteriori exercé à l’égard des actes des collectivités locales par les représentants de l’Etat dans les préfectures[65]. Cependant, la tutelle reste maintenue pour la dissolution d’un service de garde communal ou communautaire. Elle concerne aussi la tenue de la première réunion du conseil communal après le renouvellement général qui doit être présidée par l’autorité de tutelle ou son représentant et l’approbation du règlement intérieur du conseil des collectivités locales. Ce qui nous replonge dans le vieux débat de la tutelle et remet en cause le contrôle de la légalité.
Le contrôle de l’Etat s’étend aussi sur les titulaires de fonctions électives et sur les organes. En l’espèce, l’article 78 détermine les modalités de sanctions applicables. Les sanctions en la matière se situent à deux niveaux : la suspension et la dissolution. La première est prononcée par arrêté du Ministre en charge des collectivités locales mais pour une durée qui ne peut excéder trois mois. Comme on le voit, cette sanction vise l’organe de contrôle donc le conseil communal. En outre, sur la base de l’article 79 le ministre en charge des collectivités peut, par décision motivée, suspendre de ses fonctions un conseiller communal ou régional, un membre de l’exécutif ou un délégué du conseil d’une collectivité locale qui a été inculpé de crimes ou délits pour une durée qui ne peut excéder trois (3) mois. Cette décision est transmise sans délais au ministre en charge des collectivités locales.
La dissolution ne peut intervenir que lorsque le conseil d’une collectivité locale a fait l’objet de trois suspensions, pour faute grave. Aussi, le conseil d’une collectivité locale dont le tiers au moins des membres a été reconnu coupable de crimes ou délits peut être dissout. Elle est prononcée par décret du Président de la République sur proposition du Ministre chargé des collectivités locales[66]. Si dans le texte de 2006, le régime de la dissolution était circonscrit aux crimes et délits attestés par une décision de justice, le nouveau texte étend les causes de dissolution également à trois suspensions intervenues à l’encontre d’un conseil. Ce nouveau régime renforce à cet effet, le pouvoir de dissolution mis à la disposition de l’exécutif qui, par ce dernier élément peut se passer de toute justification liée à une décision de justice pour dissoudre un conseil d’une collectivité locale. Cette extension se comprend aisément suite aux difficultés et contestations survenues face aux dernières opérations de dissolution employées par l’exécutif.
B : Les contrôles financier et technique
A priori, les opérations financières des collectivités territoriales sont exécutées conformément aux articles 4 et suivants du décret D/2013/015/PRG/SGG portant règlement général de gestion budgétaire et de comptabilité publique par les ordonnateurs et des comptables publics. Dans ce cas, l’Etat a le droit de contrôle et de vérification sur la comptabilité de gestion des collectivités locales et sur la capacité de gestion financière de celles-ci. Le receveur est soumis au contrôle technique des services du Trésor qui effectue au moins une fois par an une vérification de la comptabilité de gestion de la collectivité locale. Ce contrôle annuel comporte obligatoirement un rapprochement des écritures du receveur et de la situation de son encaisse.
Le contrôle a posteriori des comptes des collectivités locales est exercé par la Cour des comptes. En matière de transmission des comptes, l’article 59 ne fait pas de distinction entre les comptables des collectivités décentralisées et ceux des organes centraux et déconcentrés[67]. Il dispose que « la comptabilité générale de l’Etat est tenue par les comptables publics sous l’autorité de l’agent comptable central du Trésor qui centralise les comptes des comptables publics de l’Etat ». Ce sont donc, les comptables subordonnés qui rendent leurs comptes au comptable principal dont ils relèvent et qui contrôle leur compte. Les comptables principaux procèdent à la reddition de leurs comptes de gestion à la Cour des comptes dans un délai et selon les modalités fixées par arrêté du Ministre en charge des finances après avis de la Cour des comptes. En cas de retard dans la reddition de leurs comptes, des amendes peuvent être infligées aux comptables publics principaux par la Cour des comptes[68].
Par ailleurs, les ordonnateurs des collectivités locales sont tenus aux mêmes obligations que les ordonnateurs de l’Etat. Ils sont soumis, aux dispositions générales relatives aux ordonnateurs, décrites dans le décret relatif au Règlement Général de Gestion Budgétaire et de Comptabilité Publique[69] . Ils constatent et liquident les recettes prévues, engagent, liquident et mandatent les dépenses autorisées. En particulier, ils sont tenus d’observer les règles d’imputation budgétaire, la règle du service fait, le respect de la nomenclature des pièces justificatives et l’exercice du droit de réquisition.
Le budget de la collectivité locale est soumis à l’approbation du représentant de l’Etat conformément à l’article 441 du code révisé des collectivités locales. L’approbation est l’acte par lequel le représentant de l’Etat rend exécutoire le budget de la collectivité locale. Le contrôle du budget conformément aux articles 442 et suivants s’exerce a posteriori l’autorité exécutive locale transmet le budget adopté au représentant de l’Etat dans la préfecture ou à son délégué dans les meilleurs délais et au plus tard dans les 15 jours qui suivent le vote. C’est le cas du PV de la délibération créant une nouvelle recette locale ou modifiant le taux ou le tarif d’une recette locale ; mais aussi les comptes.
La première forme de contrôle budgétaire porte sur l’établissement du budget lui-même. Le budget doit être présenté en équilibre réel[70]. Le pouvoir exercé par le représentant de l’Etat en la matière peut l’amener à saisir la cour des comptes dans les hypothèses ci-après : non concordance avec les affectations prévues par la loi de finances ou des dépenses illégales, déséquilibre budgétaire, non prise en compte des restes à payer lorsque leur existence est établie, non prise en compte des dépenses obligatoires. Le deuxième moyen révélateur du maintien d’un contrôle d’opportunité est la substitution. Les modalités procédurières d’exercice de ce pouvoir de substitution assurent l’intervention en liaison avec le représentant de l’Etat et de la Cour des comptes. Le contrôle budgétaire au moyen de la substitution s’exerce dans les cas suivants : budget voté hors délai, absence d’équilibre réel du budget, défaut d’inscription au budget d’une dépense obligatoire, apparition d’un déficit dans l’arrêt des comptes. Aux termes de l’article 444, si le budget n’est pas adopté avant le 31 janvier de l’exercice auquel il s’applique, le représentant de l’Etat arrête le budget et le rend exécutoire conformément aux dispositions de la Loi Organique Relative aux Lois de Finances (LORLF) et du Règlement Général sur la Gestion Budgétaire et la Comptabilité Publique.
Ces dispositions ne sont applicables que quand le défaut d’adoption résulte de l’absence de réception par la collectivité locale avant le 15 mars des dispositions de la loi des finances de l’année la concernant. Dans ce cas, le conseil dispose d’un mois après cette réception pour arrêter le budget. Il faut noter aussi que le budget de la collectivité locale est rendu exécutoire par le préfet lorsque celui-ci est voté en déséquilibre. Dans cette hypothèse, le préfet, après l’avoir fait formellement constater et notifier au conseil, saisit, dans les trente (30) jours, la Cour des comptes. Celle-ci propose à la collectivité locale les solutions nécessaires à l’établissement de l’équilibre et demande au conseil une nouvelle délibération.
Le représentant de l’Etat ne rend exécutoire le budget que lorsque le conseil n’a pas délibéré dans un délai d’un mois à partir de la communication des propositions de rétablissement de l’équilibre ou n’a pas pris les mesures de redressement suffisantes. Enfin, le préfet procède au mandatement d’office d’une dépense obligatoire, après une mise en demeure sans résultat au cas où, le président d’un conseil refuse de la mandater. Lorsque l’arrêté des comptes d’une collectivité locale fait apparaitre un déficit des dépenses sur les recettes égales ou supérieures à 10% du budget de fonctionnement et selon la taille[71] de la collectivité, la Cour des comptes de sa propre initiative ou saisie par le représentant de l’Etat, formule des mesures nécessaires au rétablissement de l’équilibre budgétaire dans un délai d’un mois à compter de cette saisine[72].
S’agissant du contrôle technique, il s’entend comme l’obligation faite aux collectivités locales d’observer toutes les prescriptions prévues par les lois et règlements en vigueur dans l’accomplissement de leurs actes. Ce contrôle technique s’exerce à travers les interventions des services techniques de l’Etat dans la conclusion des marchés, des contrats d’exécution des travaux et l’attribution des subventions[73]. Ce contrôle intervient aussi en matière d’urbanisme : les projets de schéma de cohérence territoriale, les plans d’occupation des sols (POS). Rentrent dans le même cadre : les projets de coopération ou entente entre collectivités locales guinéennes et collectivités locales étrangères, les projets de coopération décentralisée.
L’Etat peut donc exercer par l’intermédiaire de ses services techniques compétents, toute inspection et tout contrôle de nature technique prévue par les lois et règlements en vigueur sur les services gérés par les collectivités locales. Tous les principes de gestion du régime commun des établissements publics nationaux peuvent être applicables aux établissements publics locaux. Il en est de même de leur modalité de création, de fonctionnement et de contrôle, sauf disposition spéciale. La tutelle administrative et financière des établissements publics locaux est exercée conjointement par l’ordonnateur et le comptable de la collectivité. La gestion administrative, financière et comptable est exercée respectivement par un directeur et par un agent comptable. Par ailleurs, le contrôle exercé sur les établissements publics est au centre du système de contrôle interne en Guinée.
Conclusion
Il en résulte de l’ordonnancement juridique actuel, une recomposition :
– des circonscriptions territoriales par l’exclusion des régions administratives, des quartiers et districts : ces circonscriptions comprennent désormais les préfectures et les sous-préfectures ;
– des collectivités locales par l’intégration des régions et la transformation des C.R.D en Communes Rurales, les anciennes communes, chefs-lieux de préfectures étant appelées Communes Urbaines[74]. Cette réorganisation qui transforme les régions en collectivités décentralisées explique aussi l’élan pris en matière de décentralisation progressive en Guinée. Le nouveau texte légal sur la décentralisation est le Code des Collectivités locales de la République de Guinée révisé en 2017, par l’Assemblée Nationale. Il décrit le cadre de l’Administration territoriale décentralisée qui créé une nouvelle distribution des pouvoirs et des ressources entre l’administration centrale et les collectivités locales décentralisées, qui sont chargées de la gestion de leurs affaires. Les élections locales de 2005 ont pu contribuer à accroître la légitimité des organismes et conseils exécutifs délibérants et élus[75] ; quoiqu’ils n’aient pas pu à l’état actuel, améliorer leur autorité, autonomie, responsabilité et leur capacité[76]. Sur le fondement de la Constitution du 07 mai 2010, le procédé de décentralisation est théoriquement répandu à travers le pays notamment avec les dernières élections communales de 2018. En matière de contrôle, le représentant de l’Etat assure le contrôle de la légalité des actes des Régions, des Communes Urbaines et des Communes Rurales[77]. Le contrôle de tutelle des autorités déconcentrées cède désormais la place au contrôle de légalité, une modalité particulière de contrôle. Enfin, il faut se rendre à l’évidence que la décentralisation est un mode de « gouvernance », bien connu. Pour reprendre la formule d’un décret français de 1852 sur la décentralisation, « si l’on gouverne bien que de loin, l’on administre bien que de près »[78]. La mise en place du Haut Conseil des Collectivités et des conseils régionaux pourrait être un moyen pour institutionnaliser la participation des populations dans la gestion de leurs affaires, et appliquer les principes démocratiques à la base. Sa mise en œuvre[79] s’inscrira à coup dans une nouvelle dynamique de développement local, en vue d’améliorer les services au niveau local, encourager l’Administration à être plus responsable et à distribuer mieux les ressources et les responsabilités.
[1] Voir entre autres, P. F.GONIDEC, Les systèmes politiques africains, Paris, L.G.D.J., 2ème éd., 1978 ; J. du Bois de GAUDUSSON, G. CONAC et Ch. DEBBASCH. « Les Constitutions africaines publiées en langue française », La Documentation Française, Coll. Retour aux textes, vol. 1 et 2, Bruylant, 1997-1998 ; MEDARD J.F , Etats d’Afrique Noire : formation, mécanismes et crise, l’harmattan, Paris, 1990 ; BAYART J.F, L’Etat en Afrique, Fayard, Paris, 1992 ; I. M. FALL, « Le contrôle de la légalité des actes des collectivités locales au Sénégal », EDJA, n° 63, Octobre-Novembre-Décembre 2004, p. 61 ; Matthieu FAU-NOUGARET, « Originalité et convergence des phénomènes de décentralisation en Afrique Sub-Saharienne », CERDRADI, Afrilex, 2000, pp. 1-18..
[2] CHAPUS, Droit administratif général, Tome 1, Montchrestien, 15è éd., 2001 ; Y. GAUDEMET, Traité de Droit administratif, Tome 1, L.G.D.J., 16è éd., 200 ; G. DUPUIS, M.-J. GUEDON, P. CHRETIEN, Droit administratif, A. Colin, 8è éd., 2002. P. BODINEAU et M. VERPEAUX, Histoire de la décentralisation, PUF, Que sais-je ?, 1993 ; J. RIVERO, J. WALINE, Droit administratif, Dalloz, 20è éd., 2004 ; F. LUCHAIRE, « les fondements constitutionnels de la décentralisation : La loi du 2 mars 1982 », Rev.adm. n° 208; Rapport du C.E. de 1995 « Décentralisation et ordre juridique », E.D.C.E ; CONDE (A.), La décentralisation en Guinée, une expérience réussie, l’Harmattan, 2003, p. 15 ; A de LAUBADERE, J.C. VENEZIA, Y. GAUDEMET, Droit administratif, L.G.D.J., 17è éd., 2002. Sur la décentralisation et ses principes, Cf., C. EISENMANN, Centralisation et décentralisation : Esquisse d’une théorie générale, L.G.D.J., 1948, ; J.-M PONTIER, « La décentralisation et le temps », R.D.P., 1991, p. 1217 ; « La décentralisation entre nouveauté et continuité », Rev.adm. 1993, p. 473 ; « Dix ans de décentralisation », D. 1992 ; A. GRUBER, La décentralisation et les institutions administratives, 2è éd., A. Colin, 1996 ; P. SADRAN, « Démocratie et décentralisation », Mélanges J.-M. AUBY, 1992; R. CHAPUS, Droit administratif général, Tome 1, Montchrestien, 15è éd., 2001; Y. GAUDEMET, Traité de Droit administratif, Tome 1, L.G.D.J., 16è éd., 2001 ; G. DUPUIS, M.-J. GUEDON, P. CHRETIEN, Droit administratif, A. Colin, 8è éd., 2002; P. BODINEAU et M. VERPEAUX, Histoire de la décentralisation, PUF, Que sais-je ?, 1993 ; J. RIVERO, J. WALINE, Droit administratif, Dalloz, 20è éd., 2004 ; F. LUCHAIRE, « les fondements constitutionnels de la décentralisation : La loi du 2 mars 1982 », Rev.adm. n° 208, 1982; Rapport du C.E. de 1995 « Décentralisation et ordre juridique », E.D.C.E..
[3] Voir, essentiellement l’article de Saleh M. NSOULI, « Le renforcement des capacités en Afrique, rôle des institutions financières internationales », Finances et Développement, décembre 2000. pp.34-37 ; OURZIK, Abdelouahad, La fonction publique en Afrique : Les nouveaux défis, Centre Africain de Formation et de Recherche Administrative pour le Développement (CAFRAD), Rabat (Maroc), 13-15 décembre 1998, p.9 ; Kefing KONDE, Prestation Décentralisée des Services Publics en Guinée, Rapport Final, 2007.p.10.
[4] Voir, les articles 138 à 140 de la Constitution du 07 mai 2010.
[5] M. HAURIOU, Décentralisation, Répertoire Becquet, cité par Serge REGOURD, l’acte de tutelle en droit administratif français, L.G.D.J., 1982, p. 24.
[6] A. BOCKEL, Droit administratif, NEA, 1978, p. 24.
[7]CE, rapport public, “Décentralisation et ordre juridique”,1993.
[8] Article 134 et suivants de la constitution de 2010. En particulier, les régions ont été érigées en collectivités locales.
[9] En effet, saisi du projet de loi “Defferre” relatif à la décentralisation, le Conseil constitutionnel a eu l’occasion d’expliciter les principes de libre administration des collectivités territoriales et de contrôle administratif. Le 4ème considérant de la décision du Conseil constitutionnel n° 137 DC du 25 février 1982 relative aux lois de décentralisation indique ainsi : “Considérant qu’il résulte des dispositions précitées de l’article 72 de la Constitution que, si la loi peut fixer les conditions de la libre administration des collectivités territoriales, c’est sous la réserve qu’elle respecte les prérogatives de l’Etat énoncées à l’alinéa 3 de cet article [alinéa abrogé par la loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à l’organisation décentralisée de la République, mais qui en conserve la teneur (nouvel article 72 de la Constitution française)] ; que ces prérogatives ne peuvent être ni restreintes ni privées d’effet, même temporairement ; que l’intervention du législateur soit donc subordonnée à la condition que le contrôle administratif prévu par l’article 72 (…) permette d’assurer le respect des lois et, plus généralement, la sauvegarde des intérêts nationaux auxquels, de surcroît, se rattache l’application des engagements internationaux contractés à cette fin”
[10] CONDE (A.), La décentralisation en Guinée, une expérience réussie, Op. cit., p. 15.
[11] KONDE (K), Prestation Décentralisée des Services Publics en Guinée, Rapport Final, 2007.p.10.
[12] Le 20 Octobre 1990, les ordonnances n° 091 et 092/PRG/SGG/90 portant respectivement sur le régime financier et fiscal des communautés rurales de développement (CRD) et l’organisation et le fonctionnement des CRD en République de Guinée ont été également publiées.
[13] Voir également les dispositions du décret N°91/142/PRG/SGG du 24 mai 1991, portant principes généraux d’organisation et de fonctionnement des services communaux en République de Guinée.
[14] L’ordonnance n°91/048/PRG/SGG rectifiant l’article 51 de l’ordonnance n°092/PRG/SGG/90 fixant l’organisation et le fonctionnement des CRD en République de Guinée.
[15]KONDE (K), Prestation Décentralisée des Services Publics en Guinée, Rapport Final, 2007.p.10.
[16] Ibid.
[17] Ibid.
[18] L’Ordonnance N°003/PRG/SGG/89 du 5 janvier 1989, portant délimitation de la ville et des Communes de Conakry et l’ordonnance n° 019/PRG/SGG/90 du 21 avril 1990 portant organisation et le fonctionnement des communes en République de Guinée.
[19] V. Le 20 Octobre 1990, les ordonnances n° 091 et 092/PRG/SGG/90 portant respectivement sur le régime financier et fiscal des communautés rurales de développement (CRD) et l’organisation et le fonctionnement des CRD en République de Guinée ont été également publiées.
[20] Elles sont: 1.) Commune de KALOUM 2.) Commune de DIXINN 3.) Commune de RATOMA 4. Commune de MATAM 5.) Commune de MATOTO. Il faut faire remarquer que cette ancienne législation a été intégrée dans le nouveau code des collectivités locales de 2006.
[21] Voir les articles 235 et suivants de l’ordonnance n°019/PRG/SGG/90 du 21 avril 1990, portant formation, organisation et fonctionnement des Communes en République de Guinée.
[22] ibid., article 1.
[23] Le nombre de Conseillers variait de la manière suivante: – 11 Conseillers pour une population égale ou inférieure à 10.000 habitants – 15 de 10001 à 30.000 habitants – 19 de 30001 à 40.000 habitants – 23 de 40001 à 50.000 habitants – 27 de 50001 à 60.000 habitants – 31 de 60001 à 100.000 habitants Pour les communes de plus de 100.000 habitants, le nombre de Conseillers augmente d’une Unité par Tranche de 25.000 habitants. V. Article 26 de l’ordonnance n°019/PRG/SGG/90 du 21 avril 1990, portant formation, organisation et fonctionnement des Communes en République de Guinée.
[24] Ibid.
[25] Ibid., article 71.
[26] Ibid., article 69.
[27] Ces domaines sont les suivants : – Le budget communal ainsi que les décisions modificatives – Les comptes du Maire et du Receveur Communal – L’intervention des Communes dans le domaine économique et social
– Les programmes d’investissement et les actions de développement financés sur fonds propres, sur fonds de concours ou fonds d’emprunt. – La création, la modification ou la suppression des marchés et foires de la Commune. – Les acquisitions d’immeubles, les projets, plans, devis et traités de constructions neuves – La dénomination des rues, places et édifices publics – La fixation de la rémunération du personnel communal lorsque celle-ci n’est pas déterminée par l’autorité supérieure. – La création des régies de recettes ainsi que les règlements relatifs à leur organisation et à leur fonctionnement
[28] V. l’article 18 de l’ordonnance n°019/PRG/SGG/90 du 21 avril 1990, précitée.
[29] Ibid., article 19.
[30] Ibid., articles 20-21.
[31] Ibid. article 23.
[32] CONDE (A.), La décentralisation en Guinée, une expérience réussie, Op. cit., p. 98.
[33] Voir article 1 de l’ordonnance n°91/048/PRG/SGG rectifiant l’article 51 de l’ordonnance n°092/PRG/SGG/90 fixant l’organisation et le fonctionnement des CRD en République de Guinée
[34]Voir l’article 51 de l’ordonnance n°092/PRG/SGG/90 fixant l’organisation et le fonctionnement des CRD en République de Guinée
[35] Ibid. les articles 53 et suivants.
[36] Voir Chapitre VII du Code des Collectivités Locales de la République de Guinée.
[37] La loi du 2 mars 1982 complétée par la loi du 22 juillet 1982 a introduit en droit français le procédé de la tutelle juridictionnelle à l’égard des collectivités territoriales. Désormais, le représentant de l’Etat ne peut annuler ou suspendre les actes des autorités locales. Il doit les déférer au tribunal administratif qui tranchera de leur légalité. En Guinée tout comme au Sénégal, le législateur a proclamé la suppression de la tutelle par l’interdiction de tout contrôle d’opportunité. En Guinée l’article 68 dispose que «…il (le contrôle) ne porte que sur la légalité et non sur l’opportunité. Il n’implique pas la subordination hiérarchique des organes décentralisés et ne doit pas entraver la libre administration des collectivités locales ». De même au Sénégal l’article 3 du code des collectivités locales dispose que « les collectivités locales sont seules responsables dans le respect des lois et règlements, de l’opportunité de leurs décisions ». Est donc privilégié le contrôle a posteriori. Toutefois, la portée de cette disposition est tempérée par l’existence du contrôle a priori pour les actes les plus importants des collectivités locales (budgets, emprunts, plan de développement par exemple) et par le pouvoir reconnu au juge administratif de trancher le différend né de l’exercice du contrôle de légalité par le représentant de l’Etat. On lira à ce sujet, avec intérêt l’article de Ismael Madior FALL. Le contrôle de légalité des actes des collectivités locales au Sénégal, revue internationale de droit africain EDJA, n° 63 Octobre-Novembre-Décembre 2004, pp. 61 et s.
[38] Il est vrai que la libre administration confère une certaine autonomie aux collectivités locales mais, comme le soulignent L. FAVOREU, P. Gaia, R. GHEVONTIA, J-L. MESTRE, O. PFERSMANN, A. ROUX, G. SCOFFONI « celle-ci est limitée par le contrôle administratif exercé par l’Etat et par la nécessité de maintenir l’unicité du pouvoir normatif, conséquence du caractère unitaire de l’Etat », droit constitutionnel, Précis Dalloz, 6è éd., 2003, p. 432. Sur le principe de la libre administration, la littérature est abondante. On peut citer, outre la littérature relative à l’articulation entre constitution et décentralisation citée plus haut, libre administration des collectivités locales : réflexion sur la décentralisation (sous la direction de J. MOREAU), PUAM, 1994 ; M. BOURGOL, « Libre administration et décentralisation », in vertus et limites de la décentralisation, colloque des 2 et 3 mai 1985, Clermont Ferrant, Les cahiers de droit public, p. 63 ; A. ROUX, le principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales et de ses limites, V. L. TOUVET, J. FERSTENBERT, C. CORNET, les grands arrêts du droit de la décentralisation, 2ème éd. Dalloz, 2001, pp. 3-43. Pour une étude du principe de libre administration, V. A. DIOKHANE, « Le principe de libre administration des collectivités locales. Observation sous la décision du conseil constitutionnel sénégalais en date du 11 décembre 2001 », in Afrilex, n° 3 le statut du juge en Afrique, pp. 223-242, http://www.u-bordeaux4.fr, consulté le 12 octobre 2012.
[39] V. A. de LAUBADERE et autres, Traité de droit administratif, Op. cit., p. 95.
[40] Cette dimension constitutionnelle résulte de la consécration par les différentes constitutions du principe de la libre administration des collectivités locales. V. F. LUCHAIRE, Décentralisation et constitution, Economica, 2003, p. 102 ; L. FAVOREU, « Décentralisation et constitution », R.D.P., 1982, p. 1259.
[41] Ibid., p. 164.
[42] Voir l’ordonnance abrogée N°019/PRG/SGG du 21 avril 1990, portant formation, organisation et fonctionnement des communes en République de Guinée.
[43] R. CHAPUS, droit administratif général, 15ème éd., Tome 1, Montchrestien, 2001, p. 412. Pour Charles EISENMANN, la tutelle qu’il appelle « pouvoir de contrôle » ne doit s’exercer que pour des motifs de légalité. Dès lors que l’autorité de tutelle contrôle l’opportunité des décisions de l’autorité sous tutelle, il s’arroge des pouvoirs discrétionnaires de contrôle. Par la suite, il n’ya plus décentralisation. V. Ch. EISENMANN, Cours de droit administratif, Tome 1, (problèmes d’organisation de l’administration), op. cit. ; pp. 265 et s ; PONTIER (J-M.), « La décentralisation, une construction inachevée », R.A., n°296, 1997, pp. 182-190.
[44] Les actes administratifs unilatéraux de types « étatique » sont dits exécutoires dès leur émission mais n’acquièrent la « force » qu’à partir de leur publication ou notification. Les actes administratifs unilatéraux de types « décentralisés » ne le sont que lorsque la publication ou la notification intervient en même temps ou après la transmission au représentant de l’Etat. Voir, Geneviève KOUBI, « Acte exécutoire et actes des autorités locales », R.D.P.1990, pp. 1229-1622.
[45] La publication est faite par affichage à la porte du siège de la collectivité locale et dans les principaux lieux publics de son territoire. Les décisions intéressant spécifiquement les personnes physiques ou morales doivent être notifiées aux intéressés par correspondance écrite dans les huit jours. Cette publicité s’étend aux décisions et règlements en vigueur sur le territoire de la collectivité et ceux du territoire national.
[46] Les actes pris au nom de la collectivité locale et dont la transmission au représentant de l’Etat n’est pas spécifiquement exigée par la loi sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés. Voir article 407 du code révisé des CL.
[47] A propos du Sénégal, le professeur Ismael Madior FALL relève à ce niveau que le « manuel de procédure de contrôle de légalité et budgétaire » utilisé par le Ministère de l’intérieur pour la formation de l’ensemble des représentants de l’Etat aux principes de base du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire évoque au pluriel les personnes morales dont les actes sont concernés par le contrôle de légalité institué par le code des collectivités locales sénégalais. Enumérant les personnes morales dont les actes sont concernés par le contrôle de légalité, il cite « les structures et établissements publics locaux » catégorie dans laquelle il range « les ententes interrégionales », les groupements mixtes, les ententes intercommunales, les communautés, les groupements d’intérêt communautaire et les agents régionaux de développement. Il ajoute même les régies locales. V., I. M. FALL, « contrôle de la légalité des collectivités locales au Sénégal », op. cit. p. 76.
[48] Certains auteurs ayant abordé la question des actes soumis au contrôle de légalité comme Pascal CADIEUX, ce dernier parle des « collectivités locales et leurs satellites », V. P. CADIEUX, le déféré préfectoral, coll. « l’essentiel sur », 1999, p. 5 ; FANACHI, Manuel de contrôle de légalité des actes des collectivités locales et de leurs établissements publics, 2ème éd., A.G.C.L., La documentation française, 1991, p. 14.
[49] Ibid., article 71 al. 2
[50] Le contrôle a posteriori est érigé en contrôle de principe.
[51] I. M. FALL, « le contrôle de légalité des collectivités locales au Sénégal », Op., cit., p.77.
[52] V. article 71 du code des collectivités locales de la Guinée.
[53] Ce sont par exemple les actes relatifs à la coopération décentralisée internationale.
[54] Il s’agit : des délibérations et décisions du conseil ; les décisions prises par délégation du conseil en vertu de l’article 71 ; les décisions réglementaires et individuelles prises par l’autorité exécutive locale dans l’exercice de son pouvoir de police ; les actes à caractère réglementaire pris par les autorités locales dans tous les autres domaines qui relèvent de leur compétence en application de la loi. Ces actes sont obligatoirement transmis au représentant de l’Etat dans la préfecture pour le contrôle de la légalité. L’autorité d’Etat dispose d’un délai de 15 jours à partir de la date de réception pour se prononcer.
[55] Le code n’a pas été explicite à ce niveau comme dans l’article 71 car aucune énumération des actes n’est faite la formulation négative est cependant vague surtout à l’article 407 en ces termes « les actes pris au nom de la collectivité locale et dont la transmission au représentant de l’Etat n’est pas spécifiquement exigée par la loi sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés ».
[56] Voir., article 289 du CCL
[57] Ibid., article 293.
[58] Les actes unilatéraux visés sont les délibérations des conseils ou les décisions prises par délégation des conseils, les actes à caractères réglementaires pris par les collectivités locales, les décisions individuelles concernant l’administration et la gestion du personnel des collectivités locales, les décisions réglementaires et individuelles mais aussi les actes de gestion quotidienne pris par l’exécutif local.
[59] Les seuls actes contractuels concernés par le contrôle de légalité sont les conventions relatives aux marchés publics ainsi que les concessions de service public et de travaux publics.
[60] Voir René CHAPUS, Droit Administratif, op. cit. p. 1019.
[61] Voir, Sabine MARTIN, « Contrôle a posteriori de légalité des actes des collectivités locales », p. 242.
[62]C’est ce qui explique qu’en France, la position de la jurisprudence ait évolué pour aboutir finalement à investir le préfet de la capacité à intenter un recours pour excès de pouvoir contre un contrat soumis ou non à obligation de transmission, le CE ayant interprété le déféré comme dirigé non pas contre le contrat, mais contre la décision de passer le contrat. Voir, CE français, 4 novembre 1994, département de Sarthe, CE, 30 septembre 1996, Commune de Grenoble. V., P. CADIEU, Le déféré préfectoral, op. cit., p. 29.
[63] Ismael M. FALL, « le contrôle de légalité des actes des collectivités locales au Sénégal », op. cit., p. 95.
[64] L’institution du contrôle a posteriori a incontestablement une portée émancipatrice pour les collectivités locales. Elle induit un élargissement et un approfondissement de la liberté des collectivités locales en ce que l’entrée en vigueur et l’exécution de leurs actes ne sont plus conditionnées par la volonté des autorités de tutelles. Il s’agit d’un progrès pour les libertés locales.
[65] Article 73 code des collectivités locales de la Guinée.
[66] Ibid., article 80.
[67] L’ancien règlement général de comptabilité publique disposait dans ses articles 176 et 177 alinéa 1, que les comptables des collectivités territoriales adressent le compte de gestion ou le compte financier approuvé par le Directeur National du Trésor et de la comptabilité publique qui en assure la mise en état d’examen avant transmission à la Cour des comptes.
[68] Voir article 60 du décret D/2013/015/PRG/SGG portant règlement général de gestion budgétaire et de comptabilité.
[69] Voir, articles 79 à 83 du décret D/2013/015/PRG/SGG.
[70] Voir article 441 du code révisé des collectivités locales de la Guinée.
[71] Les 10% sont exigé s’il s’agit d’une collectivité de moins de 20.000 habitants et 5% dans les autres cas.
[72] Article 447 du CCLG.
[73] Cette tutelle technique est la preuve tangible de l’omniprésence de l’Etat. En France, dans la pratique antérieure à 1982, la tutelle technique jouait un rôle essentiel en ce que diverses normes techniques étaient imposées aux collectivités locales dans l’exercice de leurs activités par l’Etat. Voir, Joseph NSAKANI « Décentralisation congolaise : un processus inachevé », Revue EDJA, n°80, janvier-Mars 2009, p. 57.
[74] ZOGBELEMOU (M. T), « La constitution du 07 mai 2010 (contexte et innovation) », article déjà cité, pp. 1-23.
[75] KONDE (K), Prestation Décentralisée des Services Publics en Guinée, Rapport Final, 2007.p.10.
[76] Après les élections communales de 2005, le Général Lansana CONTE Président de la République a procédé lui-même à la nomination des maires en mettant ainsi fin aux querelles de leadership qui gagnait le parti présidentiel. Ces nominations constituaient ainsi un mépris des textes en vigueur. V. ZOGBELEMOU (M. T.), Elections en Guinée Technologie électorale et imbroglio juridique, l’Harmattan, 2007, 235 p.
[77] Le Gouverneur et le Préfet sont respectivement assistés par des organisations consultatives, le Conseil Régional de Développement (CORD) et le Conseil Préfectoral de Développement. Ils sont chargés d’assurer la cohérence et l’harmonie entre les interventions de l’Etat (buts, directives, et efforts) et celles des collectivités locales. Le CPD est un organisme qui assiste le préfet. On s’attend à ce que le CPD local favorise la gestion des questions communales pour toutes les collectivités et encourage un dialogue opérationnel entre les différents acteurs impliqués dans le développement local: l’Etat, les collectivités locales, les OSC et le secteur privé.
[78] Décret du 25 mars 1852 sur la décentralisation administrative en France.
[79] L’institution est prévue dans la Constitution du 7 mai 2010, cependant elle n’est pas encore opérationnelle faute d’adoption d’une loi organique.